La communication était certainement fondamentale et centrale dans le cadre du projet LASART. Les artistes se sont réapproprié à des fins artistiques un appareil voué à la communication afin d’établir un échange constant et instantané, défiant ainsi l’espace-temps qui sépare les interlocuteurs.
Comme l’avance Ginette Daigneault dans l’article « Au croisement des pratiques artistiques et communicationnelles : un art qui a lieu » (2001), l’art réseau est un art de performance et de participation, dans lequel le rapport au processus de création doit être apprivoisé. Autrement dit, l’expérience artistique fait appel à l’interactivité de façon expérimentale et se définit par les interventions des participants. L’action de communiquer ainsi que ses résultats sont priorisés comme production artistique plutôt qu’une réalité matérielle.
L’expérience doit aussi être collective et, dans le cas de LASART, instantanée. Au-delà du réseautage artistique connu, tels que le Mail Art et le réseautage assuré par les centres d’artistes, on met ici en cause la télécommunication, très peu utilisée comme outil artistique.
La télécommunication a intrigué et émerveillé les artistes participants, même si chez plusieurs l’apprivoisement s’est fait rapidement. Ces derniers ont échangé leurs réflexions avec des inconnus qui leur sont très vite devenus familiers, même s’ils ne connaissaient ni le visage, ni la voix de leurs correspondants.
De nos jours, et surtout chez les plus jeunes, la communication télématique est tenue pour acquise, voire banalisée; des échanges, autant professionnels que personnels, sont envoyés quotidiennement dans un univers virtuel qui échappe à toute matérialité.
Les échanges par télécommunication de LASART étaient similaires au clavardage du XXIe siècle, mais réalisés de façon rudimentaire. Comme il n’y avait qu’une seule voie de communication, il a fallu beaucoup d’organisation pour planifier les rencontres, faire coïncider les horaires des artistes ou carrément les faire participer à tour de rôle. Toutefois, quelques artistes sont allés au-delà des intentions du projet, et leur expérience se rapproche des échanges soutenus et spontanés qui sont communs aujourd’hui.
Les échanges entre Tom et Lise en sont un bon exemple. Malgré la distance, malgré les barrières limitant la communication aux mots écrits, ce qui a débuté comme une réflexion sur les manifestations artistiques qui leur étaient contemporaines a évolué rapidement en un flirt. Même si cette rencontre émotive était entrecoupée par la planification d’un projet final collectif réalisé à l’aide de l’appareil photolaser, il reste qu’un lien particulier s’est établi entre les deux participants.
Il s’agit peut-être d’un des premiers flirts qui a pris naissance par l’entremise de la télécommunication, demeurée jusqu’alors très professionnelle. Ce cas était annonciateur d’une réalité qui n’est pas hors de l’ordinaire plus de 30 ans plus tard. Les « blind dates » virtuelles étaient destinées à voir le jour, mais elles ont dû attendre, du moins pour se populariser, la venue de l’Internet.